Quelques pistes d’utilisation de la blockchain en Retail et Supply Chain
Bitcoin, Ethereum, NFT ; des mots en vogue en ce moment, et depuis quelque temps, qui ont tous un lien commun : ils se servent de technologies liées au principe de blockchain.
Dans la suite de l’article, nous aurons l’occasion de revenir sur ce qu’est la technologie blockchain, quels sont ses atouts et ses limites et comment cette nouvelle technologie peut être utilisée dans le monde de la Supply Chain et du Retail au travers de différents cas d’utilisation.
Qu’est-ce que la blockchain ?
Commençons par définir ce qu’est une blockchain. Selon blockchain France, la blockchain est « une technologie de stockage et de transmission d’informations, transparente, sécurisée, et fonctionnant sans organe central de contrôle ». On pourrait donc comparer la technologie blockchain à un registre à livre ouvert dans lequel des « mineurs » viennent rajouter les blocs de transaction des différents utilisateurs en réalisant une tâche qui permet la validité du nouveau bloc (Proof of Work, Proof of Stake, Proof of Capacity, etc.). Les blocs sont alors cryptés et liés les uns avec les autres afin de disposer de l’entièreté de l’historique : une chaîne de blocs.
Les premières utilisations de la blockchain ont été le développement de cryptomonnaies comme le Bitcoin, l’Ethereum et bien d’autres (15 617 au 14 juin 2021 selon CoinMarketCap pour une valeur de 2 031 milliards d’euros). Ici les cryptomonnaies utilisent la blockchain comme un registre des transactions de cryptomonnaies entre les utilisateurs.
Une autre utilisation populaire de la technologie blockchain ces derniers temps concerne les NFT (non-fungible token ou jeton non fongible en français). La blockchain enregistre la propriété de ces jetons numériques qui peuvent être variables par nature : œuvre d’art, cartes de collection, objets de collection de jeux vidéo et encore bien d’autres. Les jetons sont bien uniques, grâce à la blockchain qui assure l’unicité du propriétaire, et peuvent être générés et échangés sur diverses plateformes.
Ces deux utilisations de la blockchain reposent sur une blockchain publique qui peut être consultée par tout utilisateur. Dans le cadre d’un projet mené en entreprise, des blockchains dites privées accessibles à des utilisateurs prédéfinis, sont principalement déployées.
Intéressons-nous désormais aux atouts que représentent la technologie blockchain.
Les 5 atouts principaux de la blockchain…
Le premier atout de la technologie blockchain repose sur l’intégrité de la blockchain. En effet, toute information écrite dans la blockchain est et restera la même pour toujours : toute information contenue dans la blockchain ne peut être modifiée a posteriori.
Son deuxième atout est de mettre en place un registre exhaustif, décentralisé qui enregistre toutes les transactions depuis l’initialisation de la blockchain permettant donc une traçabilité théoriquement parfaite.
Un autre atout que peut représenter la blockchain est sa confidentialité. La blockchain repose aussi sur des technologies de cryptographies qui permettent de crypter les informations inscrites dans la blockchain selon le besoin.
La blockchain met aussi à disposition des utilisateurs une unique version partagée de l’information permettant donc d’assurer que tous les utilisateurs ont accès à la même information en temps réel, aucun écart n’étant possible. De plus l’ensemble des informations contenues dans la blockchain est disponible intégralement pour chacun des utilisateurs.
Enfin, la blockchain peut favoriser l’automatisation de certaines tâches via l’utilisation des smart contracts. Un smart contract est un protocole informatique intelligent qui permet de vérifier automatiquement le respect des clauses d’un contrat. Coupler un process de smart contract avec une blockchain assure une sécurité plus importante des contrats.
… et quelques limites
La blockchain se veut intègre, traçable, fiable ; ce qui peut déjà apporter énormément pour une entreprise. Cependant, la blockchain ne permet pas de vérifier la véracité d’une information à partir du moment où l’information est renseignée manuellement. Si on prend par exemple une blockchain qui tracerait tous les échanges qu’il y a sur un colis, de son expédition depuis une usine jusqu’à sa réception en magasin. Imaginons que lors du passage de témoin, une information à renseigner est la date de livraison sur le centre de distribution. Si la date de livraison est renseignée manuellement, n’importe quelle date peut être inscrite. La blockchain enregistrera donc une information fausse ; une solution de contournement serait de s’appuyer sur des process automatisés sans action humaine (au scan, en utilisant des IoT, etc.).
Un autre élément à prendre en compte lorsque l’on parle de blockchain est qu’elle est informatique, digitale. Cette virtualité n’est pas gênante lorsque l’on reste dans le domaine de l’informatique. A partir du moment où l’objectif va être de traquer un produit physique et de pouvoir faire un lien unique entre sa réalité physique et sa virtualité dans la blockchain. On pourra alors se tourner vers des QR codes imprimés sur les produits ou bien encore des tags RFID.
Les technologies de blockchain représentent aussi un impact environnemental non négligeable. En effet, les blockchains utilisant des Proof of Work comme tâches de validation sont très énergivores et demandent un grand nombre de ressources hardware.
La multiplicité des blockchains publiques peut aussi représenter un risque pour les entreprises qui souhaiteraient vendre des NFT par exemple, ou accepter des paiements en cryptomonnaies : quelle solution choisir et comment identifier une solution qui sera pérenne dans le temps ?
Regardons maintenant quelques cas d’utilisation de la blockchain.
4 Cas d’utilisation en Supply Chain et dans le Retail
La blockchain a créé un véritable engouement chez les acteurs de la Supply Chain et du Retail qui multiplient les PoC (proof of concept) ces dernières années. Le prochain paragraphe a pour objectif de présenter quelques cas d’utilisation de la blockchain
1. Traçabilité des produits
La blockchain reposant sur un principe d’exhaustivité et d’intégrité de l’information, une première application est d’améliorer la traçabilité des produits. Pour chaque article produit, une blockchain pourrait contenir l’ensemble de ses éléments constituants, avec son processus de fabrication, les conditions de fabrication, l’origine des constituants, l’impact sur l’environnement, etc.
Aujourd’hui, les clients sont à la recherche d’une transparence du Retailer quant à l’origine et la qualité des produits proposés. Via cette blockchain, il serait ainsi possible de proposer aux clients plus de visibilité sur les produits. Carrefour par exemple a mis en place en 2018 une blockchain de traçabilité du « Poulet d’Auvergne FQC » et compte étendre son application à une centaine de produits de la Filière Carrefour Qualité d’ici à fin 2022.
2. Lutte contre la fraude / contrefaçon
La lutte contre la fraude et la contrefaçon sont l’une des priorités pour les acteurs du secteur du Luxe. Ici une solution utilisant des NFT pourrait être utilisée. Lors de l’acquisition d’une pièce physique, son jumeau numérique est inscrit dans une blockchain. La principale difficulté ici repose sur l’assurance de garder une correspondance parfaite entre la pièce physique et le NFT. Si une telle correspondance peut être assurée, il devient alors possible pour chaque marque de s’assurer de l’authenticité d’une pièce : si une pièce est sur le marché sans que sa contrepartie ne soit dans la blockchain, cette pièce est une contrefaçon.
Cette application de la blockchain peut être aussi intéressante dans le cadre du développement de l’économie circulaire et de la seconde main. Lors d’une vente entre particuliers, en plus de l’échange physique, il y aurait aussi un transfert de propriété du NFT assurant l’authenticité de la pièce. Ainsi, les gains sont multiples : la marque maîtrise les contrefaçons, crée un lien particulier avec ses clients et accèdent aussi aux clients de la seconde main ; quant aux clients, ils s’assurent de l’authenticité de la pièce qu’ils souhaitent acquérir.
En 2019, LVMH s’est associé avec Microsoft et ConsenSys pour développer une plateforme blockchain, AURA, qui permet d’authentifier les produits de luxe, de sa fabrication à sa vente aux clients.
3. Traçabilité de la chaîne logistique, digitalisation et automatisation des processus
La mise en place de technologies basées sur la blockchain dans le monde de la Supply Chain apporterait des gains sensibles pour un secteur qui a besoin de toujours plus de données fiables, sécurisées et disponibles.
De telles solutions permettraient :
- D’accélérer la digitalisation des informations. Aujourd’hui encore trop d’échanges se font par des mails, des fax voire des fiches remplies à la main.
- D’homogénéiser les informations. Pour chaque prestataire, chaque fournisseur, chaque intermédiaire, la data sera récoltée de la même façon, avec les mêmes champs à renseigner, etc.
- De consolider les informations. Toute la data se retrouverait ainsi disponible pour toutes les parties prenantes.
- D’automatiser certaines tâches. La mise en place de smart contracts, présentés plus tôt, permet de sécuriser les transactions et de recentrer le travail des collaborateurs sur des tâches à plus forte valeur ajoutée.
L’utilisation de blockchains représenterait des gains significatifs dans la maîtrise de sa Supply Chain qui représente un poste de coût important et un levier de croissance pour les entreprises.
VeChain est un projet de blockchain lancé en 2017 qui se concentre sur des problématiques Supply Chain. Son objectif est de mettre à disposition des entreprises des outils qui facilitent le transfert de données entre partie prenante et une meilleure gestion de sa chaîne d’approvisionnement. La plateforme s’appuie sur un tag unique des produits, par puces NFC, puces RFID ou encore code-barre pour assurer son suivi.
4. Partage d’informations
Le dernier cas d’usage présenté ici repose sur le caractère partagé et disponible en temps réel de la blockchain.
On pourrait ainsi imaginer un regroupement de transporteurs qui décident de mutualiser leurs informations sur l’état du réseau routier en temps réel. A la livraison, une multitude d’informations (délais de livraison, vitesse moyenne, consommation de carburant, conditions météorologiques, etc.) serait partagée entre les différents acteurs, leur permettant de réagir au plus vite, d’optimiser les tournées, d’identifier des leviers d’améliorations.
Conclusion
La blockchain est une nouvelle technologie qui est en fort développement ces dernières années, avec l’explosion des cryptomonnaies et le développement des NFT. Aujourd’hui, les atouts que représentent la blockchain commencent à intéresser les entreprises qui cherchent encore comment en faire de véritables leviers de croissance.
Si la blockchain présente des promesses ambitieuses, la technologie reste encore peu démocratisée, avec des ressources compétentes rares et des limites qui doivent être levées pour assurer le développement de ces technologies en entreprise.