Pourquoi en pilotage des stocks, l’analyse ABC ne suffit pas…
Vous la connaissez tous, la fameuse analyse ABC est le B.A-BA de tout bon adepte de la Supply Chain. Elle s’utilise partout : pilotage des stocks, priorisation des clients, positionnement des références dans l’entrepôt, classification de l’importance des fournisseurs, la liste est longue. Pour rappel, la méthode ABC sert à segmenter un ensemble en utilisant le principe de Pareto : les A représentent 80% du volume, les B 15% et les C 5% – le volume pouvant être un chiffre d’affaires, un coût unitaire, un nombre de palettes, etc.
Inutile de préciser que cette méthode a fait ses preuves. Mais nos Supply Chain modernes demandent un peu plus que cette analyse qui ressemble à une bonne vieille astuce de grand-mère. En effet, il manque un paramètre : la variabilité de la demande. C’est ce qui se cache dans le XYZ. On parle alors d’analyse ABC XYZ.
Il existe plusieurs méthodes pour caractériser les références XYZ. Certaines sont assez simples, comme par exemple utiliser le nombre de mois dans l’année où la référence a été consommée. Certaines plus complexes, comme utiliser le coefficient de variation, qui demande d’avoir l’historique de consommation. Dans tous les cas, nous nous retrouvons avec des références relativement stables en X, plus simples à prévoir également et des références de plus en plus erratiques au fur et à mesure qu’on se rapproche du Z.
Ceci permet donc de définir 9 segments (AX, AY, AZ, BX, BY, BZ, CX, CY, CZ). Chaque segment aura ses propres caractéristiques et il sera possible d’y appliquer une stratégie.
Evidemment, il est possible de donner encore plus de relief à chaque référence et de rajouter des dimensions et des segments, mais n’oubliez pas que chaque dimension supplémentaire va augmenter de manière combinatoire le nombre de segments. Vous pourriez rajouter une dimension concernant par exemple la fiabilité fournisseur (de fiable à non fiable : 3 catégories * ABC XYZ = 27 catégories !) ou la criticité client/marketing (bronze, argent, or par exemple, là aussi pour 27 catégories en tout). Mais si vous combinez ces 2 dimensions supplémentaires, vous vous retrouvez avec 81 catégories, ce qui est à la limite d’être pilotable. Attention donc à ne pas trop multiplier combinaisons !
Les stratégies à appliquer à chaque segment seront à adapter. On aura plutôt envie d’automatiser les X car leur prévisibilité le permet. Les C peuvent l’être également car il est possible de forcer les paramètres de pilotage pour s’assurer d’un stock suffisant qui amortira la variabilité sans prendre de risque sur le capital immobilisé : ce sont des références peu chères pour la plupart. Mais n’oubliez pas, une fois les stratégies définies, quelques références se prêtent mal à ce genre de catégorisation, il vous faudra les trouver et les gérer en exception, pour leur appliquer des modes de fonctionnements spécifiques comme un segment propre, l’adaptation de la promesse client, etc.
Il faudra avoir conscience qu’un taux de service de 100% n’est pas possible et qu’il convient de décliner l’objectif dans la stratégie de pilotage et les paramètres. Cette logique objectif > stratégie > paramètres aura pour conséquence le niveau de stock – et pas l’inverse. Et logiquement, plus de stock donne un meilleur taux de service si les stratégies sont correctement définies. Dans le cas contraire, vous aurez plus de stock mais toujours un mauvais taux de service donc ni le beurre, ni l’argent du beurre.
Et comme tout système ne se maintient que s’il est piloté, la dernière étape est évidemment de créer un système de monitoring des paramètres et des références afin de maintenir et d’améliorer la performance – en taux de service / disponibilité et en stock. Cela passe a minima par des indicateurs macros mais des analyses plus poussées seront probablement nécessaires pour analyser finement le paramétrage et la réaction de chaque référence dans sa stratégie.
L’analyse ABC n’est pas morte, elle devient plus complexe, car les Supply Chain le deviennent aussi. Comme souvent, la méthode et l’outil ne font pas tout, c’est ce que l’on en tire et comment l’on s’y prend qui en fera toute la richesse.