Service, coûts, impact environnemental : trois leviers à accorder, pas à arbitrer

L’illusion de l’optimisation unique
Pendant longtemps, la gestion des stocks a été pensée comme une équation économique : réduire le niveau de stock pour libérer du cash. Dans certains cas, cela reste pertinent. Mais aujourd’hui, la question est devenue bien plus complexe.
Les entreprises doivent simultanément :
- garantir une disponibilité produit élevée dans des contextes de demande instable et des chaines d’approvisionnement complexes,
- réduire leurs coûts logistiques et financiers dans un climat inflationniste,
- et limiter leur impact environnemental dans un cadre réglementaire et sociétal de plus en plus exigeant.
Le problème ? Ces trois objectifs sont structurellement en tension. Favoriser l’un, c’est souvent fragiliser les deux autres. C’est pourquoi le pilotage des stocks ne peut plus se résumer à un indicateur unique.
Le vrai sujet : arbitrer, pas maximiser
Dans nos interventions, nous constatons que la plupart des organisations abordent la gestion des stocks avant tout sous l’angle de la réduction des coûts : moins d’immobilisations, moins de place, moins de destructions.
Or, la performance globale ne peut être réduite à une équation financière. Le bon niveau de performance résulte d’un équilibre entre ces trois objectifs – service, coût, durabilité – en cohérence avec la stratégie et les priorités de l’entreprise.
Cela suppose de :
- Qualifier précisément les besoins clients, et accepter que tous les produits ne méritent pas le même niveau de service.
- Différencier les règles de gestion (stocks de sécurité, fréquence de réapprovisionnement, MOQ, etc.) en fonction des enjeux économiques et RSE.
- S’appuyer sur une structure d’indicateurs équilibrée, qui ne valorise pas uniquement le coût ou le taux de service, mais la performance globale.
Trouver le bon équilibre, c’est accepter de faire des compromis assumés, appuyés sur des éléments factuels, et aux ambitions mesurées.
Cas concret : arbitrer en conscience pour mieux servir
Un industriel agroalimentaire faisait face à une hausse de ses pénalités et rebuts tout en observant une inflation forte de ses coûts de stockage et une charge de planification court et moyen terme difficile à tenir pour les équipes opérationnelles. La réponse ?
- Revue complète du processus d’ordonnancement, en intégrant les dates de péremption comme contrainte de planification.
- Transformation du système de pilotage en passant d’un flux tiré à un flux poussé : Mise en place de POC et de maquettes Excel pour vérifier l’efficacité avant le déploiement
- Refonte des indicateurs de pilotage pour inclure un taux de destruction et un suivi hebdomadaire des rotations lentes.
Résultat : Un taux de service en hausse de 3 points, une division par deux des volumes de stocks jetés pour cause de dépassement de DLC et un gain de temps de 30% sur le processus d’ordonnancement
Ce qu’il faut retenir
Dans la gestion des stocks, il n’y a pas de vérité universelle, seulement des équilibres à construire. Vouloir viser un taux de service de 99 %, un coût au plus bas et zéro émission simultanément est une ambition louable… mais souvent irréaliste.
La clé n’est pas d’arbitrer une fois pour toutes, mais de construire une capacité d’arbitrage continue, au plus près du terrain et des évolutions de la demande.
Pour aller plus loin :
- Expertise – Performance des approvisionnements
- Tribune – Stocks et approvisionnements : du centre de coût au levier stratégique
- Pour une gestion des stocks durable, penser système avant solution
Cécile