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Retail

Luxe et seconde main : des notions compatibles ?

Posséder une belle pièce d’habillement d’un grand créateur est un petit faible chez de très nombreuses personnes, voire davantage chez les plus fashionistas d’entre nous. Cependant, ces beaux objets ont le vilain défaut de ne pas être à la portée de toutes les bourses… Il faut donc faire des concessions, comme acheter des produits de seconde main ! Plus économique en plus d’être plus écologique, cette démarche se démocratise de plus en plus. Quel est l’état du marché de la seconde main de luxe ?

Un marché pas si jeune

Acheter des produits de luxe de seconde main n’est pas une pratique récente : depuis longtemps, des dépôts-vente d’articles existent dans nos rues. Mais à l’ère du digital, cette pratique paraît bien démodée ! L’arrivée d’internet a lentement contribué à démocratiser les achats de seconde main en ligne.

Lorsque e-bay est arrivé, de nombreuses reventes d’articles de luxes ont par exemple eu lieu. Cependant, une certaine défiance s’est installée envers la plateforme : qualité et fiabilité n’étaient pas toujours au rendez-vous…

Des marketplaces dédiées au luxe de seconde main

Afin de proposer des articles de seconde main en ligne en gommant ces freins, plusieurs entreprises se sont développées.
On peut citer l’exemple de Monogram, qui reprend le concept du dépôt vente en ligne. Les pièces sont envoyées à Monogram qui les authentifie, les photographie et les stocke avant de les vendre, en proposant même à l’acheteur une livraison par coursier en moins de 24h dans la capitale. Le vendeur n’est rémunéré qu’en fin de parcours.

Autre exemple, chez Vestiaire Collective, n°1 du secteur. Le processus fait un peu plus recours au vendeur : c’est lui qui prend les pièces en photo et les envoie. L’authentification est faite en digital par VC, sauf pour les articles à plus de 1 000€. Ceux-ci transitent par un entrepôt spécifique. Ils y sont authentifiés de manière physique, aux frais de l’acheteur, moyennant un délai de livraison de quelques jours.

Dans un cas comme dans l’autre, on retrouve des éléments communs. Un branding qui reprend les codes du luxe, une belle mise en valeur des produits… Les arguments écologiques et l’authentification renforcée se font discrets : dans le luxe, même de seconde main, l’expérience client prime. Ce type de plateforme séduirait aujourd’hui 62% des consommateurs du marché. 

Une nouvelle offre physique qui s’installe

Le boom de ces marketplaces de seconde main de luxe n’a pas échappé aux grands acteurs de la distribution de mode et de luxe. Ils ne comptent pas perdre leur place ni rater ce tournant !
Ainsi, on voit apparaître au sein des grands magasins de nombreux corners, voire des étages entiers dédiés à la seconde main.

Les Galeries Lafayette, le Bon Marché ou encore le Printemps proposent désormais tous un espace où trouver des articles vintages ou bien de « mode responsable ». Ils s’appuient d’ailleurs notamment sur ces grands acteurs du digital pour des collaborations.

Plus qu’un simple partenariat opportuniste, ces nouveaux rayons viennent inscrire la seconde main comme une tendance de fond. C’est encore plus vrai pour les produits de luxe, pour lesquels nouveaux et anciens modèles doivent désormais cohabiter sous les toits de ces institutions.

La seconde main, tendance surveillée par les maisons de luxe

La seconde main de luxe, adoubée par les grands magasins, monte donc en puissance. Le marché est estimé à 28 milliards d’euros en 2022. Les plus grandes marques ont de leur côté des réactions très différentes les unes des autres.

Certaines maisons restent dubitatives et refusent de se lancer dans la seconde main de peur d’écorner leur image ou de canibaliser leurs ventes.

Au contraire, chez Kering, on y croit. « Le luxe de seconde main est désormais une tendance réelle et profonde, en particulier parmi les jeunes consommateurs”, avait expliqué François-Henri Pinault. “Plutôt que de l’ignorer, nous voulons au contraire saisir cette opportunité pour continuer à améliorer les services proposés à nos clients et orienter l’avenir de notre secteur vers des pratiques plus innovantes et plus durables. ». Ils ont d’ailleurs investi 178M€ auprès de Vestiaire Collective.

D’autres maisons, comme Stella Mc Cartney ou Gucci valident également le modèles. Ils ont noué des partenariats avec des spécialistes de la seconde main de luxe pour assurer la vente de leurs pièces d’occasion.

Quant à LVMH, le groupe reste à l’écart du marché pour l’instant, tout en reconnaissant l’opportunité que représentent ces ventes. Ils mettent par ailleurs en avant la qualité de leurs produits, et leur offre de réparation. Ils sont cependant en train d’étudier les opportunités offertes par la blockchain, qui pourrait par exemple permettre l’existence d’une carte d’identité numérique pour leurs produits. Une vraie aubaine pour le marché de la seconde main, car cela faciliterait l’étape de l’authentification !

Enfin, Isabel Marant propose un autre modèle : la marque possède son propre site de seconde main. Celui-ci permet d’acheter des pièces vintages de la marque, mais aussi de revendre en échange de bons d’achats valable également sur du neuf. A noter, ce type de modèle commence à se répandre parmi les marques plus grand public.  

Quel intérêt pour les maisons de luxe ?

En prenant du recul, il est intéressant d’identifier les intérêts pour une maison de luxe de piloter sa seconde main. On peut en identifier plusieurs :

  • Un mouvement vers l’économie circulaire où la seconde main coche de nombreuses cases
  • Une opportunité de chiffres d’affaires additionnel sur un marché existant de toute façon (ce qui limite l’effet de cannibalisation)
  • Un élément marketing qui va devenir un basique
  • Une opportunité de réinventer son offre
  • Plus pragmatiquement, s’assurer d’un marché de seconde main liquide et bien valorisé permet de justifier d’une tarification très élevée dans le neuf !

Quel acheteur pour du luxe en seconde main ?

Après ce tour d’horizons, vous l’aurez compris, il existe de très nombreuses possibilités pour se procurer des pièces de luxe. Cela dit, ce secteur est connu pour proposer une expérience privilégiée à ses clients. Qui sont ces acheteurs prêts à s’en passer ?

Le profil type des consommateurs semble être plutôt des jeunes femme, âgées de 18 à 34 ans. Lorsqu’elles achètent une pièce de luxe de seconde main, elles choisissent souvent une pièce « iconique » d’une grande maison, vintage, pour son côté indémodable et valeur sûre. Celles-ci déclarent par ailleurs à 82% qu’elles n’auraient pas acheté de produit neuf si elles n’avaient pas trouvé en seconde main. Il s’agit donc majoritairement d’un nouveau public cible pour ces produits. Public avec un budget plus serré, mais un réel intérêt pour les grandes maisons de luxe…

En conclusion…

Le luxe de seconde main apparait donc comme une opportunité tant pour notre planète que pour les consommateurs et les différents distributeurs se positionnant sur ce créneau. Il pourrait aussi s’agir d’un nouveau tournant à ne pas rater pour les grandes maisons de luxe.

Il reste cependant nécessaire dans de nombreux cas de bien clarifier l’offre pour proposer une expérience cohérente aux clients de la marque tout en créant un business model vertueux… et rentable !


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Sixtine
Consultante senior